C'est un grand honneur de vous accueillir à La Canée, sur l'île de Crète. Une île qui, depuis des années, est liée aux idéaux de démocratie et de liberté, depuis sa lutte pour l'indépendance jusqu'à sa résistance héroïque contre la tyrannie pendant la Seconde Guerre mondiale. C'est un privilège particulier pour la Grèce d'accueillir la Commission des questions politiques et de la démocratie du Conseil de l'Europe. Le Conseil de l'Europe est le gardien de la démocratie, de la liberté, des droits de l'homme et de l'État de droit dans tous les pays européens qui y participent.
Malheureusement, cette réunion se tient dans une période de profonde instabilité, alors que les piliers fondamentaux de l'ordre international établi après la Seconde Guerre mondiale sont soumis à une pression intense, voire en pleine décomposition. En effet, l'un des piliers les plus respectés, à savoir la règle de la non-agression territoriale, a été violé de manière flagrante lorsque la Russie a envahi l'Ukraine et occupé des régions entières du pays.
Quelques jours seulement après l'invasion, le Conseil de l'Europe a réagi avec fermeté en expulsant la Russie de l'Organisation, confirmant ainsi que la défense de ses principes fondamentaux ne pouvait être remise en cause. Dans le même temps, d'autres acteurs, tels que l'Union européenne et les États-Unis, ont imposé une série de sanctions visant à contrer l'agressivité russe. L'Europe, et même le monde entier, se trouve à un tournant décisif. Si ces faits accomplis sont acceptés, le langage révisionniste fera à nouveau son apparition dans le débat politique, avec des conséquences imprévisibles.
Dans ce contexte, le rôle du Conseil de l'Europe en tant que gardien de la démocratie sur le continent européen est déterminant, compte tenu du lien entre autoritarisme et agressivité extérieure. La montée du populisme, la propagation de la désinformation – souvent accélérée par l'utilisation abusive des technologies émergentes – et l'érosion des législations protégeant les libertés fondamentales constituent une menace pour la résilience de la démocratie. En effet, la régression de la démocratie dans plusieurs pays européens est une source de préoccupation constante, régulièrement relevée et soulignée par les rapporteurs du Conseil de l'Europe.
L'attachement indéfectible du Conseil de l'Europe aux droits de l'homme, qui trouve son fondement dans la Convention européenne des droits de l'homme, se reflète dans le travail essentiel de votre commission. En favorisant le dialogue, la sensibilisation et le débat sur les développements politiques dans tous les États membres, la Commission joue un rôle déterminant dans la mise en évidence des défis auxquels sont confrontés la démocratie et l'État de droit. Grâce à sa surveillance politique et à sa diplomatie parlementaire, elle contribue à identifier les risques émergents susceptibles de compromettre le respect de la Convention et des libertés fondamentales qu'elle garantit.
Nous devons garder à l’esprit la chose suivante : Gaza, le Soudan, la Libye et d'autres régions ne font pas partie de l'Europe du point de vue géographique. Cependant, le respect des droits de l'homme universels est notre responsabilité, quel que soit le lieu où les violations sont commises. Non seulement parce que nous risquons d'être confrontés aux conséquences de ces violations à nos frontières extérieures, mais surtout parce que l'Europe se doit de défendre l'humanisme universel. Les concessions sur les droits humains fondamentaux sont inacceptables pour nous, Européens.
La Grèce, berceau antique de la démocratie et membre du Conseil de l'Europe depuis 1949, reste fermement attachée aux valeurs et aux normes que cette organisation défend et promeut. Au milieu de crises successives, de complexités géopolitiques et de défis contemporains, mon pays continue de travailler sans relâche pour une Europe démocratique, une Europe qui soit un modèle en matière de droits de l'homme et d'État de droit. Ces principes sont indispensables à une Europe forte et fondée sur des principes sur la scène internationale.
Je vous lance aujourd'hui un appel : restons unis. Dans les circonstances difficiles actuelles, chacun d'entre nous ne peut faire grand-chose à lui seul pour la paix et la prospérité dans le monde. Mais ensemble, nous pouvons accomplir des miracles. Comme l'a dit Aristote, «le tout est plus grand que la somme de ses parties». C'est ce que nous sommes.
Mai 26, 2025