Intervention du ministre des Affaires étrangères, Giorgos Gerapetritis, lors d'un débat public du Conseil de sécurité des Nations Unies sur la protection des civils en période de conflit armé (New York, 22 mai 2025)

Intervention du ministre des Affaires étrangères, Giorgos Gerapetritis, lors d'un débat public du Conseil de sécurité des Nations Unies sur la protection des civils en période de conflit armé (New York, 22 mai 2025)

Tout d'abord, je tiens à remercier M. Tom Fletcher, Secrétaire général adjoint aux Affaires humanitaires et Coordinateur des secours d'urgence, Mme Sima Bahous, Secrétaire générale adjointe des Nations Unies et Directrice exécutive de l'Entité des Nations Unies pour les femmes, Mme Mirjana Spoljaric, présidente du Comité international de la Croix-Rouge, et Mme Janti Soeripto, présidente et directrice générale de l'ONG « Save the Children US », pour leurs observations pertinentes.

Aujourd'hui, nous sommes confrontés à une multitude de crises graves : agressivité, déplacements forcés, changement climatique, insécurité alimentaire, défis en matière de santé publique et utilisation malveillante des technologies numériques. Ces défis constituent la toile de fond de l'impact dévastateur des conflits armés sur les civils à travers le monde.

Et je note ce qu'a dit la présidente Spoljaric au sujet de l'augmentation du nombre de conflits armés, qui s'élève aujourd'hui à 130.

Il y a près de 2 500 ans, l'historien athénien Thucydide écrivait que « la guerre est un maître sévère ». Cette maxime reste d'actualité. 80 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, nous traversons l'une des périodes les plus critiques de l'histoire contemporaine. La crise humanitaire à Gaza a pris des proportions catastrophiques, aucune aide n'étant autorisée à entrer dans la bande de Gaza depuis plus de deux mois. Avec plus de 50 000 Palestiniens tués, le niveau de souffrance humaine est sans précédent et le besoin de respecter le droit international humanitaire, et plus particulièrement les quatre Conventions de Genève, reste plus que jamais impératif. Le respect de ces règles est impératif, comme l'a souligné le secrétaire général adjoint, M. Fletcher.

En Europe, l'invasion de l'Ukraine par la Russie en 2022 a laissé des traces indélébiles parmi les civils. Les attaques causant de lourdes pertes parmi les civils se sont considérablement intensifiées depuis le début de cette année. À l'échelle mondiale, des conditions qui portent atteinte à la dignité humaine prévalent, avec des populations déplacées et des personnes vivant au seuil de la pauvreté, comme c'est le cas, entre autres, au Soudan, en République démocratique du Congo, en Syrie, au Yémen, au Myanmar et en Haïti.

Selon le dernier rapport annuel du Secrétaire général, l'année 2024 a enregistré une augmentation effrayante du nombre de victimes parmi les membres des missions humanitaires et les journalistes, le nombre de personnes portées disparues dépassant les 16 000, tandis qu'un nombre choquant de 52 millions d'enfants ont été privés d'accès à l'éducation dans des pays touchés par des conflits armés. Nous devons garder à l'esprit que derrière ces chiffres se cachent des vies humaines et les droits des générations futures.

La réalité sur le terrain, dans les conflits armés les plus longs et les plus complexes, dresse un tableau sombre de violence et de destruction.

Cette violence a le visage et la voix des enfants, des femmes et des filles, des personnes âgées et des personnes handicapées. Je rappelle l'intervention poignante de la Secrétaire générale adjointe, Mme Bahous. Elle se fait l'écho du personnel des organisations humanitaires, qui apporte les solutions indispensables pour sauver des vies sur le terrain, et des journalistes, qui s'efforcent de fournir des informations précises sur les conflits armés. En ce qui concerne la protection du personnel diplomatique, qui accomplit sa mission dans des conditions difficiles, il est de la plus haute importance que la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques soit respectée par toutes les parties. Les attaques ou les menaces d'attaque sont inacceptables.

Aujourd'hui en particulier, nous exprimons notre horreur face à la nouvelle de la mort par balle à Washington de deux membres du personnel de l'ambassade, ainsi que des coups de feu tirés à proximité de diplomates étrangers en visite à Jénine, en Cisjordanie. Nous condamnons ces actes de violence odieux et appelons toutes les parties à traduire les responsables en justice.

Dans cet esprit, permettez-moi de commencer par me concentrer sur le groupe le plus vulnérable qui, je pense, doit être notre priorité absolue. Les enfants. Des enfants pris au piège de conflits armés meurent. Nous considérons comme un impératif moral de mettre fin à toutes les formes de violence à l'encontre des enfants et de les prévenir. Je tiens à saluer le travail inestimable de l'UNICEF, du Représentant spécial du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés, ainsi que du Représentant spécial du Secrétaire général sur la violence contre les enfants. Leur engagement sans faille renforce la responsabilité de cette organisation de placer les enfants au cœur des efforts en faveur de la paix et de la sécurité.

Comme l'a indiqué la présidente Soeripto, les enfants ne devraient pas être traités comme de jeunes adultes.

Dans leurs efforts pour soutenir leurs familles et leurs communautés dans les conflits armés, les femmes sont souvent victimes de violences physiques, sexuelles et psychologiques.

Le nombre de travailleurs humanitaires tués en 2024 a été plus élevé que jamais, la grande majorité d'entre eux ayant perdu la vie à Gaza. Comme l'indique le Secrétaire général dans son rapport, les campagnes de désinformation et la diffusion d'informations préjudiciables, amplifiées par l'utilisation des technologies de l'information et de la communication, ont encore sapé la confiance dans les acteurs humanitaires, réduit l'efficacité opérationnelle et mis en danger le personnel des organisations humanitaires.

Toutefois, l'espoir demeure lorsque nous travaillons ensemble : dans le Pacte pour l'avenir, récemment adopté, les États membres ont pu réaffirmer leur engagement à lutter efficacement contre les conflits armés, notamment en garantissant l'accès à l'aide humanitaire, en protégeant le personnel des organisations humanitaires et le personnel des Nations Unies et des acteurs associés, en mettant fin à l'impunité et en contrôlant le transfert international d'armes conventionnelles. À cet égard, je voudrais souligner les points suivants :

L'action visant à garantir le respect, par les États et les parties impliquées dans des conflits, des dispositions du droit international humanitaire, du droit international des droits de l'homme et des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, nécessite une approche globale. Cette approche implique des mesures concrètes et pratiques, à savoir une volonté politique et une action politique résolue, des mécanismes consultatifs, une coopération internationale permanente, des mécanismes de surveillance renforcés et des structures de coordination bien établies.

L'impunité encourage davantage d'agressivité. Il est donc impératif de garantir que les responsables de violations du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme répondent pleinement de leurs actes.

Il est essentiel que l'aide humanitaire vitale puisse être acheminée sans entrave, de manière régulière et en toute sécurité, dans le plein respect des principes humanitaires d'humanité, de neutralité, d'impartialité et d'indépendance. Les retards compromettent les droits des générations futures. La coopération entre le système des Nations Unies, la communauté internationale et les ONG, grâce à une planification commune et à une coopération au niveau opérationnel, peut garantir une réponse humanitaire rapide et renforcer les mécanismes de protection.

Il est de notre responsabilité et de notre devoir de veiller à ce que le personnel des organisations humanitaires, ainsi que le personnel des Nations Unies et des organismes partenaires, puissent accomplir leur mission en toute sécurité et dans la dignité. Nous soulignons également la nécessité de mettre pleinement en œuvre la résolution 2474 sur les personnes disparues et soutenons sans réserve l'action des Nations Unies, notamment par la création d'une commission sur les personnes disparues. Il est tout aussi important de soutenir la contribution inestimable et le rôle moteur des femmes en période de crise et de les protéger contre la violence sexiste, y compris les femmes journalistes.

Les journalistes doivent pouvoir accomplir leur travail en toute sécurité et dans la dignité. Cette année marque le 10e anniversaire de la résolution 2222 du Conseil de sécurité des Nations Unies sur la protection des journalistes et du personnel des médias en situation de conflit armé, tandis que l'année prochaine marquera le vingtième anniversaire de l'adoption de la résolution 1738 du Conseil de Sécurité des Nations Unies sur les attaques contre les journalistes travaillant dans des conflits armés, qui a été rédigée par la France et la Grèce. Dans les conflits armés contemporains, les journalistes sont souvent la cible d'une guerre hybride, confrontés non seulement à la violence, mais aussi à des campagnes de désinformation et de discours haineux qui sapent leur crédibilité. Une telle pratique équivaut à de la propagande inversée. Il est essentiel de trouver des moyens efficaces de lutter contre les discours nuisibles et de promouvoir des informations fiables et précises.

À cet égard, nous accordons une grande importance à l'utilisation des nouvelles technologies de manière à exploiter leur potentiel pour la collecte et l'analyse d'informations afin de prévoir et d'éviter les dommages causés à la population civile.

Pour conclure, je voudrais mentionner tout particulièrement les enfants. La situation actuelle à Gaza, cette catastrophe humanitaire, nous confronte à nos responsabilités. Aujourd'hui, dans le cadre du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui est le forum le plus approprié, nous devons affirmer très clairement que la guerre, la violence et la propagande ne doivent jamais priver un enfant de son droit de grandir en bonne santé et avec optimisme. Il est donc clair que notre devoir collectif est de défendre les enfants par tous les moyens possibles.

Dans cette optique, nous devons demander l'évidence, dans le cadre institutionnel du Conseil de sécurité : l'acheminement immédiat, complet et sans entrave d'une aide humanitaire à grande échelle dans toute la bande de Gaza, y compris la nourriture, les médicaments et les produits de première nécessité, ainsi qu'un cessez-le-feu durable et la libération de tous les otages. À cette fin, la Grèce, en sa qualité de présidente du Conseil de sécurité, mettra à profit la réunion mensuelle sur le Moyen-Orient qui se tiendra au plus tard le 28 mai pour se concentrer sur la situation humanitaire urgente à Gaza.

Mai 22, 2025